Quand j’écris, je m’écris moi, même quand je n’écris pas sur moi. Surtout même... et quasiment tout le temps. Je m’écris, certes, mais je ne m’écris pas tout. Parfois même, je m’écrie. Sans violence. Juste avec des mots. Des mots s’accumulant les uns après les autres. Dans le silence.
Je créais un personnage, je décris un paysage, j’invente une histoire, un autre monde, un court récit, quelque chose d’heureux, quelque chose de triste… sans rapport apparent avec moi. Mais ce ne sont pas seulement mes mots. Ces mots ont comme une appartenance. Leur combinaison amorce ma présence. Je rêvais d’écrire. C’est un rêve facile à réaliser, il suffit de prendre une feuille et un crayon. Maintenant, je rêve pour écrire. Et j’écris, pour faire rêver les autres d’un rêve qui leur appartient.
J’écris. Sans me poser de questions. En m’en posant trop parfois.
Sur un cahier bien au propre, assise à un bureau pendant des heures. Quelques mots sur un bout de mouchoir avec un crayon de papier de mon grand-père en plein milieu d’une promenade en forêt après une illumination passagère. Mais écrire, c’est aussi, griffonner ma liste de courses, remplir un chèque… sans que cela soit très significatif, c’est tout de même bien pratique !
J’écris pour briser le silence. J’écris ce que je ne peux dire. J’écris pour oublier, mais pour que le papier se souvienne à ma place.
J’écris pour me confier à un cahier qui ne me juge pas, qui n’interprète pas ce que je dis, qui ne le réutilise pas contre moi. Quelqu’un toujours présent, toujours à l’écoute, qui ne répondra jamais, mais qui saura toujours. Rassurante présence, toujours là quand on en a besoin. Attentif et silencieux.
Réconfortant.
Ecrire, c’est retirer un masque. C’est un moyen de communiquer plus facile que la parole. C’est accéder à un monde qui n’est qu’à nous. Que l’on partage, ou non, mais jamais totalement.
Quand j’écris, je suis aveugle. Quand je me relis, je me découvre à travers mes mots. Je vois ce que je ne peux dire à voix haute. Je me retrouve dans certains passages sans l’avoir fait exprès.
Parfois, écrire soulage et libère.
Etre lu, c’est triste parfois. Au début en tout cas… Triste quand des proches ne relèvent pas cette partie de moi dissimulée de-ci de-là. Ou quand il la voit là où elle n’est pas. La tristesse disparaît quand je réalise que s’ils comprenaient, je ne pourrais plus écrire. J’écris parce que j’ai quelque chose à dire que je ne peux dire, et si le message passait, je n’aurais plus de secrets. Plus rien à écrire.
Ecrire, c’est créer de l’illusion. L’histoire est un masque ; les personnages : des fictions.
Ecrire, c’est murmurer ce que l’on ne peut pas dire tout haut.
Ecrire, c’est se chercher, se perdre, se retrouver.
C’est se confronter à une page blanche. La noircir.
C’est positionner les mots qui sonnent bien entre eux ensemble. Comme un puzzle, si un mot ne s’emboite pas avec un autre ce n’est pas la peine d’essayer.
Ecrire pour ne rien dire. Ecrire pour tout dire. Ecrire parce que l’on a quelque chose à dire.
A dire autrement.
Dire sans parler. Parler sans dire.
Ecrire pour s’exprimer. Ou pour taire et se taire.
Dénoncer tout en passant inaperçu.
Ecrire pour se perdre. Et se retrouver.
Ecrire pour donner autant qu’il nous a été donné dans tous les livres que l’on a lus.
Ecrire dans toutes les langues. Ecrire avec des fautes. Sans faute.
Ecrire pour partager. S’exprimer. Communiquer. Se libérer.
Ecrire pour que les mots se souviennent à notre place.
Ecrire pour avoir moins peur.
Ecrire pour ne plus être seul.
Ecrire pour plonger dans nos rêves. S’évader. Construire. Déconstruire. Détruire. Recréer.
Ecrire pour s’amuser.
Ne pas écrire pour plaire.
Ecrire pour être lu. Ou ne pas l’être.
Une évidence.
Une envie.
Un besoin.
Ecrire n’importe où. N’importe quand.
Parfois, écrire pour écrire. Juste écrire.
Ecrire c’est ce qui m’a ouvert à la vie. Une chose du quotidien en laquelle croire. Une passion qui m’a permis de prendre de l’assurance et de mieux contrôler ma timidité. Ecrire m’a ouvert de nouvelles portes, m’a aidé à m’épanouir. Jusqu’à ce que j’ai l’impression de vivre la vie de quelqu’un d’autre. La vie des auteurs que j’aime tant lire depuis des années.
J’en rêvais.
Maintenant, je vis mon rêve.
Et si le silence et le mutisme amènent à l’écriture comme moyen d’expression, l’écriture, elle renvoie directement à la parole. Elle nous fait parler à voix haute à nouveau. Différemment. De nos écrits : pas forcément de ce que l’on a écrit mais du fait d’écrire, de produire un texte, de le partager, et parfois d’aller plus loin…
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