"Je suis convaincu que nous continuerons à lire aussi longtemps que nous persisterons à nommer le monde qui nous entoure. Tant de choses ont été nommées, tant de choses continueront de l'être, et en dépit de notre folie, nous ne renoncerons pas à ce petit miracle qui nous donne une étincelle de savoir. Il se peut que les livres n'allègent pas notre souffrance, qu'ils ne nous délivrent pas du mal, qu'ils ne nous disent pas ce qui est bien et ce qui est beau ; et ils ne nous permettront sûrement pas d'échapper au sort commun de la mort. Mais les livres nous offrent la possibilité même de ces choses, la possibilité du changement, la possibilité de l'illumination. Il se peut qu'il n'existe aucun livre, si bien écrit soit-il, qui puisse apaiser la souffrance de la tragédie de nos guerres quotidiennes, mais il se peut aussi qu'il n'existe aucun livre, si mal écrit soit-il, qui ne puisse être une renaissance pour le lecteur à qui il était destiné."
— Alberto Manguel, Pinocchio & Robinson
« Etre moi n'était arrivé qu'à moi, être moi était incompréhensiblement tombé sur moi. »
« Photographier n'est pas tuer, si ce n'est l'instant. »
« Si chaque être n'est rien, à part son propre décalage par rapport à tout le reste, alors, par le simple fait qu'il soit, il devient le reflet de tous les autres. »
« La vie est sans pourquoi. » Maître Eckhart
« La nature sature absolument tout ce qu'elle est, il n'y a rien d'autre à lui demander que sa propre présence. » Aristote
« C'est en effet dans l'éclair de la promesse de la vérité que la raison trouve le goût et l'énergie de croire en elle-même. C'est parce qu'elle entrevoit la possibilité d'une saisie de la vérité totale et définitive qu'elle trouve la force d'accomplir, pas à pas, les tâches partielles, aux résultats constamment remis en question, qui sont les siennes »
« Ce n'est jamais l'autre qui est intimidant, c'est l'idée que vous vous en faites. »
« Et pendant ce temps, la vie passe, sans unité, sans véritables évènements. A moins que vous ne notiez les minuscules tressaillements de l'existence, pour voir si, par leur accumulation, ils ne figurent pas quelque chose qui ressemblerait à un sens, à l'unité de votre vie. Tentation du journal intime où la pensée dérape sur elle-même et ne parvient jamais jusqu'à sa propre expression, parce que le fil conducteur de l'écriture n'y provient pas de la logique interne du texte, mais de la seule fragmentation du temps accomplie par le calendrier. Une tentative pour transformer la vie en littérature qui, en fait, se méprend totalement sur ce qu'est la littérature : à savoir exactement l'inverse, c'est-à-dire ce qui, en nous, ne court pas mais s'arrête, tombe en arrêt devant un fragment de réalité où se donne presque à saisir l'écho infini de toute autre chose, plus proche de nous que notre vie même. [...]
Le journal intime est aussi décevant que le monde contre lequel il s'efforce de se construire, parce qu'il livre avec une naïveté gênante l'incapacité de son auteur à radiographier les événements pour les hausser jusqu'à eux-mêmes dans l'espoir qu'ils le feront peut-être d'eux-mêmes, que leur accumulation et la rétrospection feront apparaître leur véritable sens. »